COA Triton | Sénateur et Administrateur du forum |  | 2390 messages postés |
| Posté le 01-03-2006 à 10:36:17
| Au Roi ! Après avoir précisé les pouvoirs du Roi, notre Constitution dit, textuellement, dans son article 88:La personne du Roi est inviolable; ses ministres sont responsables. Si notre constituant avait voulu dire que le Roi n’avait pas de pouvoir, à mon avis, il l’aurait dit, au lieu de lui en attribuer d’importants. Par ailleurs, notre Constitution ne dit pas que le Roi doit demander la permission à qui que ce soit pour agir. Si c’était le cas, elle le dirait explicitement or, au contraire, elle dit explicitement que la personne du Roi est inviolable et que ce sont ses ministres qui sont responsables. Ceci veut bien dire, et chacun sait que c’est dans cet esprit qu’a été écrite notre loi fondamentale, que la responsabilité politique d’un acte du Roi ne peut le toucher ou ébranler en quoi que ce soit ce qu’il incarne : la tête de l’Etat. La tête de l’Etat est « inviolable ».Mais sachant pertinemment qu’au delà de la fonction dont il est revêtu, il y a une personne avec ses qualités et ses faiblesses humaines, afin d’éviter justement qu’une quelconque action ou attitude de la personne du Roi n’affecte sa magistrature suprême, il est bien précisé que la personne du Roi (toute entière) est inviolable. Les ministres qu’il nomme exercent le pouvoir exécutif au nom du Roi et doivent jouer, en compensation si j’ose dire, un rôle quelque peu ingrat qui est celui de fusible pour protéger la personne du Roi. Jamais il ne faut que la tête de l’Etat ait à subir les conséquences de remous politiques de quelque nature qu’ils soient. Les «pseudo constitutionnalistes» qui campent dans les couloirs des télévisions et qui ne sont en réalités que des sortes d’oracles mercenaires mandatés par la particratie, auront beau dire que les pouvoirs du Roi sont « dans les faits » réduits à peau de chagrin, il n’en reste pas moins qu’ils sont, encore et toujours, constitutionnellement bien présents et fort heureusement, loin d’être négligeables. Mais les attaques systématiques dont le Roi, sa famille et le moindre de leurs gestes, font l’objet, ont pris, ces derniers temps, une dimension plus inquiétante. Ce ne sont plus quelques extrémistes viscéralement anti-royalistes qui éructent leurs insanités coutumières, mais ce sont des ministres en exercice et dernièrement le président du parti social chrétien flamand, potentiellement destiné aux plus hautes fonctions de l’Etat, qui se permettent de mettre ouvertement le monarque en cause. Ce dimanche encore, le président du nanoparlement bruxellois n’hésitait pas à prendre un ton fataliste en répondant élégamment à une question sur la royauté : « Il y a moyen de faire avec ».Tout se passe comme si la monarchie devait n’être plus que tolérée à condition qu’elle soit parfaitement inodore, insipide et transparente. Toute forme de prise de position, d’avis ou de commentaire lui est immédiatement reprochée sous le prétexte grotesque que, le Roi n’étant pas élu, sa prise de parole personnelle ne peut être qu’attentatoire à la démocratie. C’est n’avoir rien compris à la construction géniale de nos constituants de 1831. C’est ne pas savoir ce que c’est qu’une monarchie constitutionnelle que de s’en tenir à ce simplisme fort à la mode. On peut en tout cas faire remarquer à ces farouches démocrates que nos révolutionnaires n’étaient pas, à proprement parler, des réactionnaires conservateurs aux ordres du despotisme éclairé, et que nul ne peut leur faire reproche de n’avoir pas pris tous les risques par amour de la liberté. Si ces gens-là ont écrit une constitution qui a servi de référence mondiale durant bien des générations, c’est qu’ils n’étaient ni débiles ni manchots. Peut-être serait-il de bonne sagesse de vérifier les qualités de ce qu’ils avaient imaginé au lieu de ranger, sans autre forme de procès, notre royauté dans les greniers de l’Histoire.La question qui vous vient donc à l’esprit, au delà de ce sentiment, que nous partageons sans doute, de sympathie affective pour un emblème vivant de notre patrimoine historique et culturel, est : pourquoi faut-il être royaliste ? La réponse me semble simple : parce qu’il faut une tête à l’Etat et que cette tête, pour être réellement au service de tous, ne doit rien devoir à personne et n’être d’aucun clan.Passons en revue, si vous le voulez bien, les quatre possibilités de statut du chef d’Etat dans un régime de liberté: o Un président élu avec pouvoir constitutionnel. o Un président élu, sans pouvoir. o Un monarque avec pouvoir constitutionnel. o Un monarque sans pouvoir. Voyez comme les choses s’éclairent ! Pour la première option - avec ou sans pouvoir - il me semble évident qu’il est très utile qu’au dessus des partis et des factions se trouve un véritable recours, institué et contrôlé suivant certains mécanismes par les élus du peuple, mais qui, dans les moments captieux ou dans certains dossiers qui mettent tout le pays en cause ou qui modifient ses lois, puisse assurer la barre de l’Etat et personnifier le bien commun. Au nom de la démocratie, j’opte donc volontiers pour un chef d’Etat qui ait un certain pouvoir.Je vous avoue par ailleurs que je ne comprends pas bien l’utilité d’une tête sans pouvoir, et que les pays qui s’offrent un président inconnu, élu comme une sorte de super gouverneur grand coupeur de rubans, ou ceux qui cultivent une royauté qui n’a d’autre rôle que de faire pleurer dans les chaumières devant les « grands moments d’émotion » télégéniques, à leurs naissances, mariages et enterrements, me paraissent faire du luxe sans beaucoup de justification. Enfin pour la seconde alternative - le président ou le monarque - comment peut-on choisir celui qui n’est pas élu ? Et bien, justement, parce qu’il n’a pas eu à se faire élire, et qu’ainsi, il n’a jamais de sa vie dû faire allégeance à un camp contre un autre, et pour que le dernier des citoyens, de quelque bord qu’il soit, ne puisse le considérer que comme son souverain. Mais un souverain qui, éduqué au seul service de son peuple, n’accepte sa souveraineté que comme personnification de celle de chaque citoyen.Plus prosaïquement, franchement, que préférez-vous comme chef de l’Etat : un Beaudouin Ier, un Albert II, un Carlos d’Espagne dont la popularité défie les études statistiques, ou alors ces deux présidents voisins de France et des Etats-Unis, qui sont cordialement détestés dès avant leur élection par la moitié, au moins, de leurs concitoyens, et qui sont condamnés, tout au long de leur mandat, à soigner en toute priorité les intérêts de leur mandants ? Ces régimes présidentiels sont peut-être efficaces, parfois, mais ils ne sont certainement pas plus démocratiques que les monarchies ayant des pouvoirs constitutionnels.Enfin je signale à ceux qui sont plus mesquins que moi que, c’est prouvé et vérifié, les royautés en général et la nôtre en particulier coûtent infiniment moins cher au trésor public que les présidents qui se succèdent de très dispendieuse façon. C’est ainsi qu’il nous reste largement les moyens, dans la grande tradition la plus moderne qui soit, de porter ce toast à la vraie démocratie : « Au Roi !» Source: Le courrier de pascal n°45
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« Je n'ai rien contre les femmes à lunettes, mais il faut reconnaître que ça fait froid au ventre.» |
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